Selon le sénateur Plett, le C-7 est un « échec immense », faute de consultations du gouvernement fédéral auprès des Autochtones

Le 11 février 2021 (Ottawa, ON) – L’honorable Don Plett, leader de l’opposition au Sénat, a émis la déclaration suivante :

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet d’une question qui mérite une grande attention et beaucoup plus de temps que celui qui m’est imparti. Je suis certain que d’autres sénateurs parleront aussi de cette question, mais elle mérite autant d’attention que le Sénat peut lui accorder.

Je parle du fait que le gouvernement a carrément omis de consulter les Autochtones. Lors des séances du comité sur le projet de loi C-7, des témoins ont soulevé cette préoccupation à maintes reprises. Maître Scott Robertson, associé principal de l’Association du Barreau autochtone, a déclaré ceci au comité :

La préparation et la rédaction de ces amendements étaient tout sauf respectueuses: on a essentiellement fait fi de la participation et des idées des Autochtones.

Neil Belanger, directeur exécutif de la British Columbia Aboriginal Network on Disability Society, a déclaré ceci :

À ma connaissance, le gouvernement a tenu une seule réunion avec des organisations autochtones, et bon nombre d’entre elles n’ont pas pu y assister.

Mme Carrie Bourassa, professeure au département d’épidémiologie et de santé communautaire du Collège de médecine de l’Université de la Saskatchewan, nous a dit ceci :

Six aînés de nations métisses et de Premières Nations de la Colombie-Britannique, [de la Saskatchewan], du Manitoba et de l’Ontario ont partagé leurs connaissances sur les attitudes, les pratiques, les problèmes et les inquiétudes ayant trait à la fin de vie. Ils ont notamment dit que les Autochtones n’avaient pas été consultés sur la question de l’aide médicale à mourir [...]

Tyler White, chef de la direction des services de santé de Siksika, a dit ceci :

Il est inquiétant que les consultations entourant le projet de loi C-7 menées à ce jour auprès des Autochtones du Canada, qui seront touchés de façon disproportionnée par cette mesure, aient été aussi inadéquates.

Bonnie Brayton, directrice nationale du Réseau d’action des femmes handicapées du Canada, a déclaré ceci : « Les Autochtones handicapés n’ont pas été consultés. »

Le Dr Thomas Fung, médecin-chef des services de santé de Siksika, nous a dit ceci : « Personne dans notre communauté ne connait les détails de ce projet de loi, et il n’y a assurément aucun dirigeant qui a été consulté à ce sujet. »

Chers collègues, même si mon temps de parole est limité, nombreux sont les exemples du manque de respect flagrant du gouvernement à l’égard des préoccupations des peuples autochtones, des personnes handicapées, de différents autres groupes, bref, d’à peu près tout le monde.

Lors d’une réunion du comité, j’ai demandé à un groupe de témoins composé de quatre représentants autochtones s’ils croyaient que nous devrions interrompre l’étude de ce projet de loi afin d’effectuer davantage de consultations. Trois des témoins ont répondu « oui » sans hésiter, et le quatrième a répondu « peut-être ». Voilà qui en dit long sur la façon dont le gouvernement traite ce projet de loi.

L’an dernier, dans le cadre de ses consultations publiques sur le projet de loi, le gouvernement n’a organisé qu’une seule table ronde sur le point de vue des Autochtones. Par ailleurs, à cette table ronde, il n’y avait pas un seul représentant des Métis, des Inuits ou des Autochtones qui souffrent d’un handicap.

Lorsque nous avons interrogé le ministre Lametti au sujet de cette façon lamentable de consulter, il a répondu ceci : « Nous avons organisé ces tables rondes du mieux que nous l’avons pu. » C’est le mieux que le gouvernement peut faire. Le ministre a peut-être omis de lire la lettre de mandat que le premier ministre lui avait écrite, et dans laquelle on peut lire ceci :

Je m’attends à ce que, à titre de ministre, vous travailliez dans un partenariat intégral avec les peuples et les communautés autochtones dans le but de faire progresser la véritable réconciliation.

Chers collègues, d’une part, le gouvernement a présenté un projet de loi qui veille à ce que toutes les mesures soient prises pour que les lois du Canada respectent la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Or, d’autre part, il a déposé un projet de loi qui inquiète grandement les Autochtones et il tente de lui faire franchir toutes les étapes le plus rapidement possible sans mener les consultations appropriées.

Qui plus est, il ne tient même pas compte du peu de consultations qu’il a effectuées.

Dans le rapport intitulé Ce que nous avons entendu : Une consultation publique sur l’aide médicale à mourir, publié en mars 2020, le gouvernement a écrit ceci :

Lors de la table ronde, certains Autochtones ont souligné les différences dans la façon dont les Autochtones perçoivent la mort et le fait de mourir. Ils ont indiqué qu’il est nécessaire d’obtenir des conseils de la part des Aînés et des chefs spirituels. Ça permettrait de s’assurer que l’AMM est dispensée d’une manière culturellement sûre et appropriée. Certains intervenants ont déclaré qu’il était difficile de parler d’AMM et des demandes anticipées dans le Nord. De nombreux patients parlent une langue différente. Certains mots et termes de la loi sur l’AMM n’existent pas dans leur langue. Ça rend la communication sur l’AMM difficile.

Le rapport porte à croire que le gouvernement était à l’écoute, jusqu’à ce que nous apprenions lors de nos réunions de comité qu’aucune solution n’avait été mise en place pour remédier aux préoccupations soulevées.

Chers collègues, je prends une minute pour parler brièvement non pas de l’amendement de la sénatrice, auquel je reviendrai plus tard, mais des personnes handicapées. Après avoir parlé avec des membres de la communauté des personnes handicapées, m’être concentré considérablement sur cet aspect et avoir entendu les témoignages éloquents présentés au comité par des organismes de défense des droits des personnes handicapées, je suis convaincu que la création du deuxième volet et le but du projet de loi sont discriminatoires. En effet, alors que le premier volet, qui porte sur la mort raisonnablement prévisible, s’applique à tous les Canadiens atteints d’une maladie grave et irrémédiable et dont la mort approche, le deuxième volet cible expressément les personnes handicapées et laisse entendre que leur vie ne mérite pas d’être vécue.

Ce groupe protégé par la Charte se trouve donc ciblé et fait l’objet d’une discrimination injustifiée. Parmi tous les amendements que nous avons entendus aujourd’hui, honorables sénateurs, seul celui que propose la sénatrice McPhedran — je ne débattrai pas ici de son amendement; il me sert seulement d’exemple — bref, son amendement est le seul qui tienne vraiment compte des demandes de la communauté des personnes handicapées. J’en remercie la sénatrice McPhedran.

Chers collègues, ce projet de loi est un échec immense et lamentable de la part du gouvernement. Il est inacceptable. Personnellement, j’estime qu’il faut en empêcher l’adoption. Merci.

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