Discours sur la motion visant à maintenir la tenue de séances hybrides

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet de la motion visant à maintenir la tenue de séances hybrides au Sénat. Je suis certain que vous ne serez pas surpris d’entendre que je m’oppose catégoriquement à cette motion. À mon avis, nous avons complètement cessé de mettre les choses en perspective en ce qui concerne la pandémie et nous manquons maintenant à nos obligations en tant que sénateurs. Je suis conscient que la pandémie entraîne toujours son lot de défis et d’incertitudes, mais traiter le Sénat comme s’il était un établissement de soins de longue durée est une insulte pour les contribuables et un affront à la portée constitutionnelle du rôle d’un sénateur.

Si nous cherchions une façon de ternir l’image du Sénat dans la population, nous n’aurions probablement pas pu trouver une meilleure stratégie que de persister à dire que nous ne sommes pas en mesure de faire notre travail convenablement. Honorables sénateurs, c’est exactement ce que nous faisons. Nous esquivons nos responsabilités et nous nous cachons derrière des prétextes peu convaincants relevant de la peur de l’inconnu au lieu de faire ce qui s’impose. Je rappelle au Sénat un extrait de la motion que nous avons adoptée le 31 mars dernier :

Que le Sénat s’engage à considérer une transition vers un retour aux séances en personne dès que possible à la lumière de tous les facteurs pertinents, y compris les lignes directrices en matière de santé publique, ainsi que la sécurité et le bien-être de tout le personnel parlementaire [...]

Honorables sénateurs, le point primordial qui devrait se situer en haut de la liste des facteurs pertinents à prendre en compte est le suivant : avec les séances hybrides, nous ne sommes pas en mesure d’effectuer notre travail en temps opportun et de façon productive.

Tout le monde au Sénat et sur Zoom comprend que le format hybride réduit de moitié le nombre de réunions de comités, ce qui diminue ainsi notre productivité dans son ensemble. Les changements proposés dans cette motion concernant l’horaire des séances nous permettront d’augmenter le nombre de réunions de comités, sans pour autant nous permettre d’atteindre la productivité requise. J’étais très favorable à cette partie de la motion, et j’ai beaucoup participé aux discussions à ce sujet. Toute décision consistant à maintenir les séances hybrides devrait être motivée par des facteurs qui sont évidents et convaincants pour tous. Ces facteurs ne nous ont pas été fournis. Au lieu de cela, nous assistons à un défilé d’angoisses à propos de ce qui pourrait se passer, qui sont loin d’être solidement ancrées dans la réalité.

Je tiens à préciser, honorables sénateurs, que je ne veux aucunement minimiser les répercussions de la pandémie et les risques qu’elle présente. Ces risques sont réels, mais c’est notre nouvelle réalité, et cela ne changera pas. Le virus évoluera, mais il ne disparaîtra pas. Il fera partie de nos vies dans les prochaines années.

C’est la raison pour laquelle nous voyons un consensus se former à l’échelle nationale : nous devons apprendre à vivre avec le virus. Nous ne pouvons pas attendre que toutes les incertitudes soient dissipées, car il est probable que ce jour n’arrivera jamais. Nous devons continuer à protéger les plus vulnérables. Nous devons nous attendre à des augmentations soudaines du nombre de cas, nous devons améliorer les capacités de notre système de santé, nous devons tenir nos vaccins à jour et faire preuve de sagesse dans nos décisions, mais surtout, nous devons reprendre le cours de nos vies — ce qui comprend nos fonctions des sénateurs.

Je l’ai déjà dit et je le répète, un sénateur ne peut s’acquitter adéquatement de ses fonctions si nous ne nous réunissons pas à Ottawa. Les vidéoconférences ne peuvent remplacer les rencontres, les débats et les autres interactions de personne à personne qui se tiennent au Sénat et dans les corridors du Sénat. Je sais que certains sénateurs aiment l’idée de travailler de la maison, soutenant que cela leur permet de faire plus de travail dans la région qu’ils représentent. C’est un argument valable. Toutefois, je rappelle que depuis 155 ans les sénateurs réussissent à faire leur travail en étant présents à Ottawa les jours de séance et en retournant dans leur province ou territoire d’appartenance la fin de semaine et les semaines où le Sénat fait relâche.

Pourquoi cela serait-il maintenant devenu si difficile? Les sénateurs sont-ils en train d’oublier que le but premier de leur nomination est d’être présent à Ottawa pour faire leur travail? C’est la raison pour laquelle on nous a nommés. C’est écrit dans le bref qui nous appelle au Sénat :

ET Nous vous ordonnons de passer outre à toute difficulté ou excuse et de vous trouver en personne, aux fins susmentionnées, au Sénat du Canada en tout temps et en tout lieu où Notre Parlement pourra être convoqué et réuni, au Canada, sans y manquer de quelque façon que ce soit.

Honorables sénateurs, il ne s’agit pas d’une simple suggestion. C’est un ordre, comme l’indique le libellé. Ce dernier indique noir sur blanc l’obligation pour les sénateurs d’être présents au Sénat pour faire leur travail. Même si les séances hybrides nous ont été utiles comme mesure temporaire pendant l’incertitude du début de la pandémie, cette période est maintenant loin derrière nous. Il est temps que nous regagnions notre milieu de travail.

Je trouve préoccupant, chers collègues, que nous soyons ici sur place — ou à la maison, payés par les fonds publics — à nous demander si nous devrions retourner sur notre lieu de travail alors que le reste du pays l’a déjà fait. Nous ne débattons pas d’un projet de loi. Nous n’étudions pas un projet de loi gouvernemental. Nous nous demandons si, plus de deux ans après le début de la pandémie, nous devrions recommencer à nous présenter au travail.

Chers collègues, les infirmières sont allées travailler pendant toute la pandémie, tout comme les médecins, les préposés aux bénéficiaires, les camionneurs, les commis d’épicerie et les pompistes et tout comme les fonctionnaires qui déneigent les rues, livrent le courrier ou font la collecte des ordures. C’est ce que nous appelons les services essentiels. Or, pour une raison que j’ignore, la majorité des sénateurs semblent considérer que leur travail n’est pas un service essentiel. Nous demandons plutôt que d’autres portent la responsabilité que nous ne sommes pas prêts à assumer, même si nous sommes titulaires d’une des plus hautes charges publiques au pays.

Chers collègues, il fut un temps où faire preuve de leadership signifiait mener par l’exemple. C’est une notion qui inspire encore certaines personnes aujourd’hui. Ceux qui font preuve de ces qualités gagnent le respect de ceux qu’ils servent.

Le leadership dont fait preuve le président ukrainien Zelenski en est un exemple parfait. Lorsque la guerre a éclaté en Ukraine, le président Zelenski a refusé un ordre d’évacuation des États-Unis et a déclaré qu’il resterait à Kiev. Selon l’ambassade d’Ukraine en Grande-Bretagne, le président Zelenski aurait dit ceci : « Le combat est ici. J’ai besoin de munitions, pas d’un transport. » Cette citation, chers collègues, est devenue virale. Le président a ensuite commencé à diffuser des vidéos de lui tenant tête aux Russes dans les rues de Kiev. Dans une de ces vidéos, il a déclaré :

Je suis ici. Nous ne déposerons pas les armes. Nous allons défendre notre pays, car nos armes sont notre vérité. Notre vérité, c’est qu’il s’agit de nos terres, de notre pays, de nos enfants, et que nous allons protéger tout cela.

Chers collègues, voici un homme qui avait d’excellentes raisons d’accorder la priorité à sa propre sécurité au lieu de rester aux côtés de ceux qui défendaient son pays, mais il a refusé. Il savait qu’un chef doit mener par l’exemple afin d’inspirer confiance à son peuple et démontrer que nos gestes ne sont pas déterminés par ce qui est dans notre intérêt, mais par ce qui est dans l’intérêt de ceux qu’on sert.

Par son courage et son altruisme, le président Zelenski est devenu un symbole de leadership sur la scène mondiale. Sa bravoure a été applaudie à maintes et maintes reprises. Lorsqu’il s’est adressé par vidéoconférence aux gouvernements de divers pays, sa force, son cran et sa détermination inébranlable à prêcher par l’exemple au prix de grands sacrifices personnels ont inspiré des millions — si ce n’est des milliards — de personnes partout dans le monde.

Chers collègues, nous ne sommes pas en guerre avec un pays voisin comme c’est le cas de l’Ukraine. Nous ne sommes pas la cible de missiles qui visent des secteurs résidentiels tuant des femmes, des enfants et des aînés. Nous ne sommes pas confrontés à des crimes de guerre brutaux comme ceux que la Russie inflige aux Ukrainiens. La situation actuelle ne fait que renforcer la pertinence de cette analogie, plutôt que de la diminuer. Comme un maître l’a dit un jour dans sa grande sagesse : « Celui qui est fidèle dans les petites choses l’est aussi dans les grandes. »

Le simple fait que nous ne sommes pas bombardés ne veut pas dire que nous ne devrions pas montrer l’exemple. Chers collègues, je vous encourage à regarder au-delà de votre propre situation, de votre propre sécurité et de vos propres craintes et à considérer que nous vivons à une époque où la confiance du public dans ses institutions montre clairement des signes d’érosion. Notre conduite à titre de sénateurs n’est pas seulement dictée par les données scientifiques, mais aussi par les besoins du pays. Elle est guidée par les exigences de notre rôle. Les données scientifiques sont assez claires et nous y reviendrons sous peu, mais l’enjeu est plus important que le simple fait de déterminer le protocole de santé optimal. Nous vivons à une époque où de nombreux Canadiens remettent en question leur confiance dans les personnes en position d’autorité. Il est temps pour nous d’arrêter de faire seulement le minimum nécessaire et d’en faire plus.

On ne nous demande pas de mettre un gilet pare-balles et de nous aventurer dans une zone de conflit. On nous demande de nous acquitter des responsabilités qui nous ont été confiées par les Canadiens et de le faire en tenant compte de ce qui est le mieux pour le pays et non de ce qui est le mieux pour nous. On nous demande simplement d’être fidèles au serment que nous avons prêté à notre arrivée au Sénat et de ne pas s’en affranchir sans raison impérieuse.

Chers collègues, je suis d’avis que les conditions pour ce faire ne sont pas remplies. Il n’est pas nécessaire de poursuivre les séances hybrides, et nous devons revenir aux séances en personne, car cela correspond à la coutume de cette enceinte, à l’intention initiale des fondateurs de notre pays et aux attentes des personnes que nous servons.

Au début de la pandémie, nous faisions face à beaucoup d’incertitude. Nous ne savions pas à quoi nous attendre, car il s’agissait d’un nouveau coronavirus. Nous n’avions jamais vu ce virus chez l’humain et nous ne savions pas vraiment comment il se transmettait, quelle était sa létalité, quelles seraient ses répercussions à long terme sur la santé et si la maladie se rapprocherait davantage du rhume ou de la fièvre d’Ebola.

Chers collègues, c’était il y a 25 mois. Depuis, des milliers d’études ont été réalisées sur ce virus et des centaines d’études sur ces études. Il y a eu des articles, des bulletins de recherche, des revues de la littérature, des essais cliniques et des commentaires du milieu universitaire. Il y a eu des rapports hebdomadaires sur la morbidité et la mortalité, des résumés épidémiologiques quotidiens et des rapports périodiques sur la surveillance des vaccins. Il y a eu des tableaux, des graphiques, des projections, des réflexions et des recommandations au point de nous étourdir et de nous faire bourdonner les oreilles.

Chers collègues, nous n’avons pas fini d’en apprendre au sujet du virus, loin de là, mais nous sommes déjà à des années-lumière d’où nous en étions en mars 2020. Le Canada a maintenant approuvé six vaccins différents, soit ceux de Pfizer, Moderna, AstraZeneca, Johnson & Johnson, Novavax et Medicago. De plus, pour ceux qui se rendent à l’étranger ou qui en arrivent, le gouvernement a aussi approuvé les vaccins Sinopharm, Sinovac et Covaxin. Nous avons des vaccins à ARN messager, des vaccins à base de vecteurs viraux, des vaccins à sous-unités protéiques et des vaccins à base de plantes. La semaine dernière, la société Moderna a annoncé que les résultats préliminaires d’une nouvelle version de son vaccin contre la COVID indiquent une meilleure durée et un meilleur facteur de protection contre le variant Omicron. Ces résultats ont suscité des réactions mitigées, mais ils indiquent que la science et notre compréhension de ce virus continuent d’évoluer.

Chers collègues, nous gagnons cette bataille lentement, mais sûrement. Je sais que bon nombre d’entre nous espèrent un vaccin qui procurera une immunité contre la COVID, comme cela a été le cas avec le vaccin contre la rougeole qui, une fois inoculé, protège totalement une personne contre cette maladie. Nous nous attendions à parvenir au même résultat dans la lutte contre la COVID. Même si cela demeure une possibilité, ce n’est certainement pas le cas en ce moment.

Néanmoins, les vaccins ont été un outil important dans la lutte pour maintenir les taux d’infection à un bas niveau, protéger les populations vulnérables, réduire les effets délétères et atténuer l’incidence globale sur le système de santé. En date du 25 avril, les données de Santé Canada ont montré que les gens pleinement vaccinés qui ont reçu le vaccin de rappel sont sept fois moins susceptibles d’être hospitalisés à cause de la COVID et onze fois moins susceptibles de mourir de l’infection. Puisqu’il s’agit d’un taux normalisé selon l’âge sur une période de quatre semaines, ces données évoluent d’une semaine à l’autre, mais elles montrent clairement que la vaccination présente d’importants avantages pour la santé.

Chers collègues, ces données témoignent du chemin parcouru grâce à la science. La science nous a donné des outils incroyables pour combattre la pandémie, mais ces données montrent aussi que la pandémie contre laquelle nous luttons aujourd’hui est loin d’être celle à laquelle nous étions confrontés en 2020 et en 2021. Une partie de cette différence est attribuable au taux élevé de vaccination, et une autre, aux changements résultants du variant Omicron, qui est plus contagieux, mais moins néfaste.

Si l’on sépare la pandémie en deux périodes, celle avant le variant Omicron et celle avec Omicron, il y a deux scénarios bien distincts. Du début de la pandémie jusqu’à la fin de novembre 2021, soit quand le variant Omicron a été détecté au Canada pour la première fois, on comptait seulement 1,8 million de cas de COVID-19 et près de 30 000 décès. Cela représente un taux de mortalité de 1,64 %.

Puis, du 1er décembre 2021 au 24 avril de cette année, 1,9 million de cas de COVID-19 se sont ajoutés, avec un peu plus de 9 000 décès. Ainsi, le taux de décès depuis l’apparition du variant Omicron a chuté à 0,49 %. Cela correspond à une baisse de 64 %. Cependant, parce que les Canadiens ne sont plus testés pour la COVID-19 comme avant l’arrivée du variant Omicron, nous savons que la baisse réelle du taux de décès est encore plus prononcée. Les études menées dans d’autres pays ont démontré une baisse de 75 % du taux de décès entre le variant Delta et le variant Omicron. Il est tout indiqué de croire que les pourcentages pour le Canada correspondent à des taux similaires.

On a remarqué une baisse dans des taux semblables pour les infections au variant Omicron. Durant la période qui a précédé l’arrivée d’Omicron, on comptait 6 400 admissions aux soins intensifs, ce qui correspond à 0,36 % des cas. De leur côté, les infections au variant Omicron ont entraîné un peu plus de 2 900 admissions aux soins intensifs, ce qui est une baisse considérable malgré que les cas de COVID-19 ont été plus nombreux au cours des cinq derniers mois que durant les 20 mois précédents. Le taux des admissions aux soins intensifs a chuté à 0,16 %, ce qui équivaut à une baisse de 56 %.

Il faudra aux scientifiques un certain temps pour déterminer les causes exactes de ces baisses. Celles-ci viennent en partie du fait qu’Omicron cause des formes moins graves de la maladie et que les taux de vaccination élevés que nous avons au Canada contribuent à mieux protéger les gens.

De plus, nous protégeons plus adéquatement les personnes très vulnérables qui se trouvent dans les établissements de soins de longue durée que nous le faisions pendant la première année de la pandémie.

Tous ces éléments feront partie du portrait d’ensemble. Peu importe les détails exacts, chers collègues, une chose est claire : la pandémie qui existe actuellement diffère de celle qui sévissait quand les premières séances hybrides du Sénat ont eu lieu. Nous connaissons le virus beaucoup mieux qu’en 2020, et nous savons que ses effets sont maintenant beaucoup moins graves qu’auparavant, comme je viens de le souligner.

De plus, les risques que comportent les voyages nécessaires pour se rendre à Ottawa sont minimes si on les compare aux risques qui existaient en 2020, lorsqu’a été présentée la première motion au sujet des séances hybrides. Il n’y avait pas de vaccins, à l’époque. Aujourd’hui, les sénateurs sont triplement vaccinés. Nous pouvons nous rendre à l’aéroport dans notre propre véhicule ou faire appel à un chauffeur pleinement vacciné. Quand nous sommes à l’aéroport, tous les employés sont pleinement vaccinés et la moitié des autres personnes aussi.

Nous montons à bord d’un avion où les passagers sont entièrement vaccinés, tout comme les membres de l’équipage. Une fois à Ottawa, nous prenons un taxi avec un chauffeur entièrement vacciné ou nous louons une voiture que nous conduisons nous-mêmes à notre lieu d’hébergement. À l’hôtel, lorsque nous réglons les formalités, tout le monde est vacciné.

Il est difficile de voir comment on peut réduire davantage le risque que comporte un déplacement à Ottawa, à moins, peut-être, de porter une combinaison de protection contre les matières dangereuses. En fait, pour être honnête, il est probablement plus dangereux de demeurer chez soi que de se déplacer à Ottawa, car les restrictions sanitaires dans nos propres circonscriptions sont beaucoup plus souples que celles qu’il nous faut respecter en voyage. Quand on est chez soi, ne sort-on pas de la maison? Ne va‑t‑on pas faire l’épicerie? Ne va-t-on pas voir nos petits-enfants participer à des événements sportifs? Ne va-t-on pas à l’église? Toutes ces activités sont plus dangereuses que de venir à Ottawa. Donc, à moins d’être en quarantaine et de ne pas quitter la maison, il n’y a pas de raison de ne pas se présenter à Ottawa.

Franchement, à ce stade-ci, je ne vois pas au juste ce que nous attendons. Quelle est la justification pour maintenir les séances hybrides? Elle n’existe tout simplement pas.

Au Canada, le nombre de cas de COVID diminue rapidement depuis le 11 avril, la moyenne sur sept jours ayant chuté de 11 000 à un peu plus de 8 000. En Ontario, le taux de reproduction net, qui mesure le nombre moyen de nouvelles infections que cause une infection, est dorénavant inférieur à 1. À Ottawa, le signal viral de COVID-19 est à la baisse depuis le 11 avril.

Il n’y a plus de confinements nulle part au pays, et les exigences liées à la vaccination contre la COVID sont en train de tomber d’un bout à l’autre du Canada. La plupart des provinces ont levé leurs mesures sur le port du masque dans la plupart des situations, dont la Colombie-Britannique, l’Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba, l’Ontario, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador. Les territoires ont levé presque toutes leurs mesures sur le port du masque. À l’Île-du-Prince-Édouard, l’exigence de porter un masque sera levée le 6 mai. La Saskatchewan n’a aucune mesure de santé publique en place concernant la COVID. Pourquoi est-il plus sécuritaire d’être en Saskatchewan sans quelque mesure que ce soit que d’être à Ottawa?

Bien entendu, le Sénat du Canada, comme un petit chien, suit le gouvernement néo-démocrate—libéral et reproduit toutes ses décisions plutôt que de se fier à la science. En fait, il semble que ce gouvernement néo-démocrate—libéral ait arrêté de s’intéresser à la science il y a longtemps, s’il a même déjà eu un tel intérêt.

L’autre semaine, mon épouse et moi sommes allés à un bureau de Service Canada au Manitoba. Nous avons constaté à notre arrivée que la porte était verrouillée, non pas parce que le bureau était fermé, mais à cause de la COVID. Un agent de sécurité a dû déverrouiller la porte pour nous laisser entrer. Après nous avoir posé des questions sur les symptômes de la COVID, il nous a fourni un masque et a insisté pour que nous le portions. Tous les employés portaient un masque et étaient protégés par des panneaux de plexiglas. La scène était irréelle, chers collègues.

Ensuite, nous sommes allés dans une épicerie Sobeys, à quelques pas de là. Le magasin n’avait pas de limites de capacité liées à la COVID. Le port du masque n’était pas obligatoire ni la distanciation sociale. Nous sommes entrés dans le magasin. Des centaines de personnes s’y trouvaient, certaines portaient le masque, d’autres non. Tous faisaient leur épicerie, déambulaient dans les allées, le sourire aux lèvres, et vaquaient à leurs occupations. Certains caissiers portaient le masque, mais aucun ne se cachait derrière un plexiglas de crainte de recevoir les postillons des clients. Nous avions l’impression de voir deux univers coexister : d’une part, l’épicerie Sobeys régie par les directives fondées sur la science de l’administrateur en chef de la santé publique, et d’autre part, le monde parallèle et fantaisiste du fédéral créé par les angoisses des premiers ministres Jagmeet Singh et Justin Trudeau. Ce genre d’incohérence est passablement répandue.

Si vous allez dans un stade, vous verrez des gradins pleins à craquer de gens qui scandent des encouragements tout en mangeant et en buvant de la bière sans porter masque et sans pratiquer la distanciation sociale. Les gens reprennent une vie normale conformément aux recommandations fondées sur la science.

Mais ici, au Sénat, les membres du personnel administratif ont reçu le 23 mars un message leur indiquant que 25 % d’entre eux pouvaient commencer, graduellement et volontairement, à revenir au bureau à compter du 11 avril. Puis, le 8 avril, soudainement, cette date a été repoussée au 25 avril.

Je ne suis pas certain de comprendre à quoi ressemble un retour graduel au bureau. Je m’imagine les employés parcourir quelques rues par jour, jusqu’à ce qu’ils soient rendus au bureau.

Chers collègues, il y a pire. Voici le contenu d’un courriel envoyé le 21 mars par les Services à la clientèle :

À compter d’aujourd’hui, le 21 mars 2022, l’exigence provinciale de porter le masque est levée en Ontario. Par conséquent, le port du masque ne sera plus obligatoire dans les endroits assujettis aux lois provinciales. Pour ceux qui travaillent dans un immeuble privé où le Sénat est locataire, dont le 40, rue Elgin, le 90, rue Sparks, le 56, rue Sparks et le 60, rue Queen, le port du masque est maintenant facultatif et n’est pas officiellement exigé dans les aires communes comme les ascenseurs, les halls d’entrée et les stationnements souterrains.

Veuillez toutefois noter que ces directives ne s’appliquent pas aux locaux appartenant à la Couronne, comme l’édifice de l’Est, l’édifice Victoria, l’Édifice national de la presse, le 1, rue Wellington et l’édifice du Sénat du Canada. Les directives de santé et de sécurité pour les lieux de travail du Sénat restent en vigueur, et nous continuons d’exiger le port du masque.

J’ai d’abord pensé que la formulation du courriel portait à confusion. Puis, j’ai réalisé que c’était plutôt une politique qui portait à confusion. Le courriel ne faisait que refléter ce fait. Voilà ce qui arrive lorsque tout le monde affirme se fier à la science, mais que personne ne semble avoir les mêmes données.

Voyons si nous pouvons démêler tout cela.

Premièrement, le port du masque n’est plus obligatoire dans les immeubles privés parce que les exigences provinciales ont changé. Jusque-là, tout va bien.

Deuxièmement, comme le courriel l’indique, « le port du masque est maintenant facultatif et n’est pas officiellement exigé » dans les immeubles privés où le Sénat est locataire, comme le 40, rue Elgin ou le 56, rue Sparks.

Cependant, le courriel indique que les masques sont facultatifs dans les aires communes, y compris les ascenseurs, les halls d’entrée et les stationnements souterrains. Pourquoi se donnerait-on la peine de mentionner les aires communes comme les ascenseurs, les halls d’entrée et les stationnements souterrains si tout l’édifice est une propriété privée qui relève de la réglementation provinciale? Est-ce à dire qu’il y a des endroits dans les édifices privés où on peut quand même être obligé de porter un masque? Le courriel ne dit rien là-dessus.

Troisièmement, on dit que cette directive sur le port facultatif du masque ne s’applique pas aux locaux appartenant à la Couronne. Si vous êtes dans l’édifice de l’Est, l’édifice Victoria, l’Édifice national de la presse, le 1, rue Wellington ou l’édifice du Sénat du Canada, vous devez porter le masque. C’est complètement insensé, honorables collègues.

Quatrièmement, on nous a dit que les directives de santé et de sécurité visant les lieux de travail du Sénat demeurent en vigueur et que les personnes qui se trouvent sur les lieux de travail du Sénat sont obligées de porter un couvre-visage.

Ce qui n’est pas clair, c’est ce qui arrive si votre lieu de travail du Sénat se trouve dans l’un des édifices privés. Est-ce qu’on peut se passer du masque parce que l’édifice est visé par les directives provinciales, ou doit-on porter le masque parce qu’il s’agit quand même d’un lieu de travail du Sénat? Ce n’est pas clair.

C’est peut-être la raison pour laquelle le courriel soulignait que le port du masque était facultatif dans les aires communes. Peut-être que si votre bureau sénatorial se trouve dans un édifice privé, vous n’êtes pas obligé de porter un masque dans l’ascenseur ou dans les corridors, mais dès que vous arrivez au Sénat, vous devez immédiatement mettre un masque.

Apparemment, nous sommes censés croire qu’agir en fonction des données scientifiques, cela ressemble à cela.

Deux jours après ce courriel déroutant, un autre courriel a été diffusé le 23 mars. Il émanait du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration. En objet, on pouvait y lire « Allégement de certaines mesures de prévention de la COVID-19 dans les lieux de travail du Sénat ». Ce courriel indiquait que le port du masque demeurait obligatoire dans toutes les aires communes, mais qu’il était permis d’enlever le masque à son poste de travail ou à son bureau, lorsque la distanciation physique est possible.

Le courriel ne faisait aucune distinction entre les édifices. Il disait simplement : « De nombreuses mesures préventives, telles que le port obligatoire du masque, restent en place dans tous les lieux de travail du Sénat. » Le mot « tous » signifie-t-il dans chaque édifice, appartenant à la Couronne ou pas? Ce n’est pas clair. C’est déroutant.

Deux jours plus tard, un autre courriel du Comité de la régie interne a été distribué. Il reprenait la majorité de ce qui se trouvait dans le courriel envoyé deux jours avant, mais on y trouvait une phrase supplémentaire à la fin :

En vertu de la Loi sur le Parlement du Canada, le comité CIBA est considéré comme l’employeur au nom du Sénat et a le pouvoir de mettre en œuvre des mesures en milieu de travail.

Autrement dit, quel que soit le bâtiment où vous vous trouviez et quelles que soient les règles à suivre dans ce bâtiment, les règles que vous devrez suivre pourraient être différentes, parce que le Comité de la régie interne a décidé d’ignorer la science et les responsables de la santé publique et de n’en faire qu’à sa tête.

Mais ce n’est pas tout.

Le 8 avril, le Comité de la régie interne a envoyé un autre mémo dont l’objet était : « Mise à jour sur les protocoles concernant la COVID-19 ». Ce courriel disait : « Veuillez prendre note que le Sénat s’aligne maintenant sur les dernières lignes directrices de la Ville d’Ottawa. » On ne nous a donné aucune précision sur la signification de ce courriel en dehors du fait que la période de quarantaine après un test positif passait de 10 à 5 jours.

Si nous nous alignons sur les lignes directrices de la Ville d’Ottawa, quelles sont-elles? Si vous consultez le site de la Ville d’Ottawa, ces lignes directrices se trouvent sous l’onglet Ordres et instructions en vigueur. Voici ce que nous pouvons y lire :

Ordonnance pour les résidents

Il n’y a pas d’Ordonnances actuellement en vigueur.

Instructions pour le secteur des sports, des loisirs et du conditionnement physique

Il n’y a pas d’Instructions actuellement en vigueur.

Instructions pour les entreprises et les lieux de travail.

Il n’y a pas d’Instructions actuellement en vigueur.

Qu’en est-il du port du masque? Pour le savoir, il faut pousser les recherches un peu plus loin, et si on le fait, on trouve sur le site Web de la ville une page qui s’intitule « Port du masque ». Sur cette page, on constate que la Ville d’Ottawa n’a pas prolongé son règlement sur le port obligatoire du masque au-delà de sa date d’expiration, le 26 août 2021. Plutôt, elle signale qu’une réglementation sur le port du masque demeure en vigueur dans l’ensemble de la province.

Donc, quel est le règlement de la province concernant le port du masque? Le site Web de la province indique ce qui suit :

À partir du 21 mars 2022, vous devrez porter un masque dans les espaces intérieurs suivants :

les transports en commun, incluant les zones intérieures et les véhicules […];

les établissements de soins de santé, y compris :

les hôpitaux

les établissements psychiatriques

les bureaux de médecins

les cliniques de vaccination

les laboratoires

les centres de prélèvement

les établissements de soins à domicile et en milieu communautaire, uniquement si vous êtes un employé ou un contractant;

les maisons de retraite et de soins de longue durée;

les maisons d’hébergement et autres établissements de soins collectifs qui fournissent des soins et des services aux personnes vulnérables sur le plan médical et social.

C’est tout. Les masques ne sont obligatoires ni dans les commerces, ni dans les centres commerciaux, ni dans les bureaux, ni dans les restaurants, ni dans les clubs, ni dans les centres de conditionnement physique ni où que ce soit d’autre, excepté le transport en commun et les établissements de soins de santé.

Ainsi, on nous dit que nous nous conformons aux lignes directrices les plus récentes de la Ville d’Ottawa alors qu’il est évident que ce n’est pas le cas.

Chers collègues, je peux traverser la rue pour aller au restaurant Métropolitain sans porter de masque, et je peux m’asseoir avec autant de personnes que je veux, les unes à côté des autres. Je peux manger, prendre un verre, et participer à des conversations intéressantes.

Cependant, si je vais de l’autre côté de la rue à l’édifice du Sénat, je dois immédiatement mettre mon masque. Aucune nourriture n’est permise lors des réunions, à moins de m’asseoir à six pieds des autres et de manger des aliments emballés individuellement.

J’ignorais que la science n’était pas la même du côté nord et du côté sud de la rue Wellington. Je n’avais aucune idée que le fait de traverser 40 pieds d’asphalte me plongerait dans une réalité parallèle régie par d’autres données scientifiques qui contredisent ce que je venais de vivre de l’autre côté de la rue.

Je n’ai jamais vraiment cru à la magie, mais je commence à penser que c’est la seule explication possible.

On nous dit, des semaines à l’avance, que la tribune publique du Sénat ouvrira à une certaine date. Pourquoi a-t-on choisi cette date? Pourquoi pas une autre date? Pourquoi pas immédiatement? Pourquoi pas plus tard? Sur quels fondements scientifiques reposent des décisions arbitraires comme celle-ci?

Notre cher Président est-il devin pour savoir qu’à une date précise il serait sécuritaire de rouvrir la tribune et de recommencer à accueillir des visiteurs? Le virus disparaît-il comme par magie lorsqu’on traverse la rue ou qu’on quitte la Cité parlementaire? Si les autorités s’en tiennent aux avis scientifiques, comment explique-t-on alors toutes ces incohérences et ces contradictions dans les règles?

La science dit que si je monte sur le toit de l’édifice du Sénat du Canada et que je mets le pied dans le vide, je vais tomber. Comme je ne veux pas vous donner de faux espoirs, sachez que je n’ai pas l’intention de vérifier cette théorie. Je suis certain que certains dans cette enceinte pourraient calculer le taux de ma chute et la vitesse à laquelle je m’écraserais au sol. C’est ainsi que fonctionne la science, chers collègues.

La science dit également que si je traverse la rue et que je me jette du toit du Château Laurier, la même loi de la gravité s’exercera là aussi. Si je saute du toit d’un édifice, je ne vais pas monter vers le haut de ce côté-ci de la rue Wellington et tomber vers le bas de l’autre côté de la rue. Les données scientifiques sont cohérentes et mesurables.

Cependant, le Comité de la régie interne, des budgets et de l’administration semble être en désaccord avec moi. Les membres du comité semblent croire que la science est différente de ce côté-ci de la rue Wellington. Je me demande bien où le comité prend ses informations. Y a-t-il des scientifiques à son service enfermés dans une pièce secrète? Si c’est le cas, il faudrait les informer que leurs recommandations vont à l’encontre de celles de pratiquement tous les responsables de la santé publique au pays. S’il n’y a pas de savants fous en coulisses, ces décisions relèvent-elles entièrement des quatre membres du comité directeur?

J’ai le plus grand des respects et beaucoup de reconnaissance pour tous les membres du Comité de la régie interne, des budgets et de l’administration, ainsi que pour les quatre membres du comité directeur, le président et les trois autres membres, dont mon collègue le sénateur Smith, mais je commence à penser que ce genre de décisions devraient être prises de façon beaucoup plus transparente de concert avec tous les membres du comité et peut-être même avec l’ensemble des sénateurs.

Je suis membre du Comité de la régie interne. Peut-être que cela m’a échappé, mais je ne me souviens pas qu’on m’ait présenté des données indiquant une situation différente de celle que nous présentent les autorités de la santé publique.

Chers collègues, je ne sais pas quand nous avons cessé de nous fier à la science, mais il est temps d’écouter les responsables de la santé publique, de suivre les directives des provinces et de retourner au travail. Il reste peu de temps avant l’ajournement d’été et je crois que nous devrions l’utiliser de façon judicieuse et efficiente. Rien ne justifie que nous fassions bande à part du reste du pays, à moins, bien sûr, que le gouvernement ne souhaite simplement pas que nous reprenions nos activités normales, que les théories du complot que nous avons tous reçues par courriel présentent la vérité et que tout ceci ne soit qu’une vile machination de forces obscures cachées dans l’ombre qui tirent les ficelles et souhaitent détruire la société, que l’Organisation mondiale de la santé dicte les politiques sanitaires du Canada et que Justin Trudeau ne soit en fait qu’une marionnette du Forum économique mondial.

Je me suis souvent demandé comment les gens pouvaient croire à de telles sornettes, mais la réalité est que le gouvernement verse régulièrement de l’huile sur le feu. Pas plus tard que la semaine dernière, nous avons appris qu’après nous avoir houspillés sans fin au sujet du changement climatique — nous en avons parlé à la période des questions il y a quelques minutes —, le premier ministre a parcouru plus de 127 000 kilomètres en avion en 10 mois. Chers collègues, c’est l’équivalent de trois voyages autour du globe. Ce gouvernement dit une chose et en fait une autre. Ils établissent des règles pour tous les autres qu’ils ne suivent pas eux-mêmes. Ils disent qu’ils suivent la science, mais ensuite ils ignorent commodément la science quand cela les arrange.

Chers collègues, le premier ministre porte un masque pour monter dans un avion à Ottawa, mais, rendu à destination, il débarque sans masque. Il met en scène des photos le montrant seul avec son épouse et ils portent des masques, même s’il n’y a personne près d’eux. Puis, après une réunion du G7, on le voit faire la fête dans un bar, sans masque et sans distanciation physique.

Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi les gens deviennent cyniques et créent des théories du complot à partir de cela. Lorsque quelqu’un essaie de donner un sens à des absurdités, il ne faut pas s’étonner qu’il arrive à des conclusions insensées. Le gouvernement rend logique le fait de croire l’incroyable. Lorsqu’on normalise l’absurdité, on commence à en voir davantage, et on en voit certainement beaucoup sous l’actuel gouvernement.

Voici un autre exemple de cette absurdité. Il y a quelques semaines, encore une fois, mon épouse et moi avons traversé la frontière des États-Unis vers le Canada. Après la levée des tests obligatoires, nous avons traversé la frontière sans problème. Quelques semaines plus tard, on a porté à mon attention que, avec ou sans exigence de tests obligatoires, le gouvernement exige toujours que tout voyageur entrant au Canada, y compris les enfants âgés de 5 ans et plus, porte un masque bien construit et bien ajusté pendant 14 jours lorsqu’il se trouve dans des espaces publics intérieurs et extérieurs.

Premièrement, le gouvernement a carrément omis de faire mention de l’existence de cette politique. Deuxièmement, et ce qui est encore plus important, cette politique est insensée. Je ne peux pas me rappeler une seule occasion pendant la pandémie où un responsable de la santé publique a recommandé que les gens commencent à porter le masque à l’extérieur lorsque la distanciation physique était possible. Je ne me rappelle pas non plus une seule étude qui estime qu’il s’agit d’une pratique judicieuse pour aider à minimiser la transmission de la COVID-19.

Nous avons tous vu dans la rue des gens seuls qui portaient le masque. C’est une chose de décider de porter le masque à l’extérieur pour des raisons pratiques et c’en est une autre que le gouvernement présente cette pratique comme une politique de santé publique reposant sur des fondements scientifiques.

C’est bien ce qui figure sur le site Web du gouvernement. CTV a publié un article sur la question dans lequel on peut lire ceci :

Lors d’une entrevue téléphonique mercredi, le Dr Peter Juni, directeur scientifique de l’Ontario COVID-19 Science Advisory Table a déclaré à CTVNews.ca qu’il ne voit pas la nécessité d’une telle exigence à la présente étape de la pandémie.

Voici ce qu’il a dit :

Je ne pense pas que le fait d’imposer le port du masque aux voyageurs qui arrivent de l’étranger, et non à la population locale, change la donne actuelle au Canada.

Vous venez d’entendre le directeur scientifique de l’Ontario COVID-19 Science Advisory Table affirmer que la politique du gouvernement ne tient pas la route sur le plan scientifique.

Qu’a répondu le gouvernement? Dans l’article, on indique qu’un représentant du gouvernement a déclaré :

La priorité du gouvernement du Canada est et continuera d’être la santé et la sécurité de tous les Canadiens [...] Tout au long de la pandémie, c’est sur les données scientifiques que le gouvernement a fondé sa réponse, ainsi que ses décisions, ses actions et ses conseils aux Canadiens afin de réduire la propagation de la COVID-19 dans les collectivités.

D’une part, le gouvernement prétend s’appuyer sur des données scientifiques, mais, d’autre part, ses politiques ne sont pas fondées sur des données scientifiques. Il est difficile de faire la quadrature du cercle.

La semaine dernière, le ministre des Transports répondait à une autre politique relative à la COVID-19 et a dit ceci :

Nous consultons constamment nos experts et nous modifions nos règles lorsque les conseils que nous recevons changent en raison de l’évolution de la situation.

Le premier ministre — je ne parle pas de M. Singh, mais de l’autre premier ministre — est également intervenu dans le dossier et a déclaré ceci :

Les gens veulent rester en sécurité, mais ils veulent aussi recommencer à faire les choses qu’ils aiment. La meilleure façon d’y parvenir est de s’appuyer sur ce que les données scientifiques et les experts nous disent et d’avancer dans la bonne direction.

Je vois que le gouvernement a entendu raison au cours de la fin de semaine et qu’il a annulé cette exigence particulière. Cependant, s’il avait vraiment voulu s’appuyer sur ce que disent les données scientifiques et les experts, beaucoup de choses auraient été gérées différemment tout au long de la pandémie.

Vous vous souviendrez peut-être qu’au début de 2020, lorsque nous avons appris que le virus circulait, Justin Trudeau a refusé d’interdire les vols entre le Canada et Pékin. Il a dit que ce serait raciste. D’autres pays ont pris le virus au sérieux. Des dizaines d’entre eux ont rapidement mis en place des mesures de protection, y compris l’interdiction de vols internationaux. Mais pas notre gouvernement. Il a été lent à reconnaître que nous avions un problème et lent à réagir. Maintenant, il est lent à se rendre compte que ses politiques relativement à la pandémie sont dépassées.

Certains membres de l’équipe de leaders du Sénat se souviendront que j’ai demandé, avec insistance, au Président de fermer cette enceinte en mars 2020, lorsque le virus a commencé à circuler. Nous étions confrontés à des risques sanitaires dont l’incidence était inconnue et devions agir. Le Président, bien qu’il ait été sensible à ma demande, y était réfractaire. J’ai vu l’importance d’agir rapidement, et d’autres s’y sont opposés. Aujourd’hui, alors qu’il est clair que nous devons aller de l’avant, ces mêmes personnes s’opposent une fois de plus à toute mesure.

Quel est l’objectif final de ce gouvernement? Pourquoi n’y a-t-il aucun plan pour mettre fin à ces mesures restrictives? Pourquoi le leader du gouvernement au Sénat n’a-t-il aucun plan pour la levée de ces restrictions au Sénat? Le gouvernement souhaite-t-il que les choses se poursuivent indéfiniment parce qu’il aime contrôler la vie des gens?

Il est clair qu’il préfère le format des séances hybrides qui lui permet de rendre moins de comptes. Mais pourquoi accepterions-nous cela, chers collègues? La reddition de comptes et la démocratie au Parlement sont cruciales, quels que soient les défis auxquels le pays est confronté et quel que soit notre niveau de soutien au gouvernement. Nous, sénateurs, devons rendre des comptes à la population.

Les circonstances inhabituelles de la pandémie ont forcé le Parlement à s’adapter, mais il est temps de revenir à la normale. La reddition de comptes ne peut attendre un jour de plus.

Chers collègues, nous avons adopté la motion initiale sur les séances hybrides le 27 octobre 2020. Notre première séance en format hybride a eu lieu le 4 novembre 2020. Cette approche a été utile pendant les moments d’incertitude, mais elle n’est plus d’actualité et nous devons passer à autre chose. Elle n’est plus appuyée par des données scientifiques et ne répond plus à un objectif clair. Elle nuit plutôt à notre capacité de faire notre travail avec efficacité et efficience.

Il ne s’agit pas d’agir avec complaisance envers nous même pour éviter de nous exposer à des risques. Il s’agit plutôt de nous aligner sur la réalité actuelle afin d’assumer les responsabilités professionnelles qui nous ont été confiées et de nous acquitter adéquatement de notre charge publique.

La COVID a changé, mais elle n’a pas disparu. Il est temps pour nous d’apprendre à vivre avec. Il est temps pour nous d’aligner cette politique et toutes nos politiques liées à la COVID avec les données scientifiques et la réalité actuelle, et non les craintes et les anxiétés d’hier.

Chers collègues, dans la motion que nous avons approuvée le 31 mars, nous nous étions engagés à envisager un retour aux séances en personne :

[...] dès que possible à la lumière de tous les facteurs pertinents, y compris les lignes directrices en matière de santé publique, ainsi que la sécurité et le bien-être de tout le personnel parlementaire;

Que toute prolongation ultérieure de cet ordre ne soit effectuée qu’après consultation avec les leaders et facilitateurs de tous les partis reconnus et groupes parlementaires reconnus.

C’est tiré directement du libellé de la motion, chers collègues.

Aucune considération n’a été accordée aux « facteurs pertinents », aucun examen des « lignes directrices en matière de santé publique » n’a été mené, pas plus que des aspects concernant « la sécurité et le bien-être de tout le personnel parlementaire », et aucune véritable « consultation » n’a eu lieu. Au contraire, nous avons écouté, bien installés sur notre siège, le représentant du gouvernement au Sénat nous répéter les notes d’allocution du gouvernement néo-démocrate—libéral, qui ne tiennent absolument pas compte de la science et des lignes directrices en matière de santé publique en vigueur à l’heure actuelle.

Chers collègues, c’est inacceptable. Nous nous trouvons dans la Chambre de second examen objectif, pas dans la Chambre qui hoche sagement la tête et qui se conforme à la dernière rengaine du gouvernement. Nous devons respecter l’engagement que nous avions pris le 31 mars et prendre une décision fondée sur les faits réels, les vraies données et les preuves scientifiques éprouvées.

Si le gouvernement veut continuer d’entraver notre travail, il doit présenter un dossier solide qui repose sur des données scientifiques probantes et les conseils des meilleurs experts pour démontrer pourquoi il est nécessaire d’adopter cette motion.

Ne vous y trompez pas : ce n’est pas la motion du sénateur Gold; c’est la motion du gouvernement. Le sénateur Gold est le représentant du gouvernement au Sénat et quand il prend la parole pour présenter une motion, c’est au nom du gouvernement du Canada.

Le gouvernement doit nous fournir des preuves qui soutiennent son affirmation selon laquelle nous ne pouvons pas nous réunir en personne. Il doit expliquer pourquoi il insiste pour nous empêcher de retourner sur notre lieu de travail. Il doit nous fournir des données, et si celles-ci ne justifient pas la tenue de séances hybrides, il doit alors nous fournir un plan de reprise des séances en personne.

Chers collègues, nous avons convenu de retourner aux séances en personne « dès que possible ». Il nous incombe donc d’effectuer la transition aussitôt que possible, et non aussi lentement que possible. Il ne faut pas oublier que, par défaut, nos séances ne se tiennent pas en mode hybride, mais en personne. Toute dérogation aux séances en personne doit être accompagnée de preuves solides fondées sur des critères scientifiques clairs.

Nous n’avons pas obtenu ces preuves du gouvernement.

À mon avis, nous devrions continuer de siéger de manière hybride jusqu’au 9 mai, ce qui laissera au gouvernement le temps de nous fournir les renseignements dont nous avons besoin, ce dont il a convenu, pour prendre la décision qu’il attend de nous.

Que le vote porte sur la fin des séances hybrides ou leur prolongation, il devrait seulement avoir lieu une fois les renseignements nécessaires obtenus et après la tenue de consultations en bonne et due forme. Nos décisions doivent se baser sur des faits et non pas sur la peur. Or, le gouvernement ne nous a pas présenté les faits.

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